
Marseille – quartier du Panier
« De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ».
Cette phrase, qui puise ses racines dans les mouvances socialistes du XIXème siècle, reste d’une grande actualité. Elle résume bien la préoccupation d’une société démocratique, qui devrait se soucier du bien-être de chacun, c’est-à-dire des conditions de vie concrètes de ses citoyens. Deux choses apparaissent dans cette phrase : la question des besoins et celle de la solidarité sociale.
Les besoins, point aveugle
Un point de vue est généralement absent des rubriques économiques classiques – je ne parle pas ici d’experts ou de journalistes moins médiatisés (Le monde Diplomatique, Médiapart, etc …), celui des besoins qui en constituent le point aveugle. On part de l’intérêt des actionnaires, exprimé par exemple par les mouvements de la bourse, ou l’importance d’attirer de nouveaux investisseurs, mais pas de la nécessité concrète pour les personnes de subvenir à leurs besoins, même les plus élémentaires (se nourrir, se vêtir, s’abriter, se chauffer, se soigner). Dans cette optique, la satisfaction des besoins ne constitue qu’un résultat indirect d’une « bonne politique économique ».
L’intérêt des grands groupes au centre
Autrement dit, on part de la satisfaction du goût pour l’accumulation des actionnaires et tout le reste devrait en découler. Pour le meilleur et pour le pire. Le Chili de Pinochet nous offre un exemple du pire. Sa politique économique était directement inspirée par les travaux de Milton Friedman, économiste que l’on peut qualifier sans outrance d’ultra libéral. Au delà de la répression féroce de tout mouvement social ou de toute velléité démocratique, la politique économique de ce régime a précipité dans la grande pauvreté un nombre considérable de Chiliens. Dans un registre un peu moins dramatique, la Grande Bretagne de Margaret Thatcher offre un autre exemple de ces politiques économiques centrées exclusivement sur les intérêts des classes possédantes.
Ici et maintenant, on observe que le programme économique du gouvernement Michel – Peeters, est lui aussi construit principalement sur l’intérêt des actionnaires. Il suffit pour s’en convaincre de lire attentivement le programme de gouvernement. Dans le programme et dans les mesures qui sont effectivement prises, tout part de là. Comment doper les entreprises ? Comprenez : comment maximiser les profits des actionnaires ? En revanche, rien de concret au niveau des besoins les plus élémentaires des citoyens.
Une promesse illusoire de bien-être
Et quant au bien-être général qui devrait découler de la « liberté d’entreprendre », cela fait plus de trente ans qu’on dit à la population de patienter1, mais force est de constater que le résultat se fait attendre. Au contraire, la pauvreté augmente et les inégalités sociales se creusent, alors qu’aujourd’hui, cyniquement, on nous ressort obstinément le même vieux discours en faisant miroiter à la population des jours meilleurs. Horizon d’un « bonheur libéral » toujours reculé.
Le déni des conditions concrètes d’existence
Ce déni de la question des conditions concrètes d’existence est particulièrement flagrant quant il s’agit du chômage ou du revenu d’insertion. Au lieu de se soucier du niveau des allocations permettant de garantir les ressources nécessaires pour mener une vie décente, on ne pense qu’aux « pièges à l’emploi », à l’aspect financier qu’on traduit par la « pérennisation du système de sécurité sociale » (tout en diminuant de manière répétée les cotisations patronales!). En somme on prend le problème à l’envers.
Partir des besoins, c’est tout d’abord se poser la question de l’accès pour tous aux biens et services nécessaires pour pouvoir mener une vie digne et valorisante dans notre société.
Ces besoins sont tout d’abord ceux qui permettent de rester en vie et en bonne santé : nourriture, vêtements, logement, chauffage, soins de santé. Mais également ceux qui concourent à la pérénisation de la société et au développement de l’individu : éducation, loisirs, transports.
La question primordiale est donc, comment satisfaire ces besoins pour l’ensemble de la population et non pas pour une part privilégiée de celle-ci ?
Les besoins devraient constituer le but essentiel d’une politique réellement démocratique, le développement économique n’étant alors qu’un outil pour la réaliser.
1 Le discours prononcé le 18 décembre 1981 devant la chambre par Wilfried Maertens (1er ministre) à l’occasion de la mise en place de son gouvernement (Maertens V), nous annonçait déjà des jours meilleurs pour autant que la population consente à des sacrifices. Il s’agissait de restaurer la compétitivité des entreprises en augmentant la productivité, en imposant des sauts d’index. Il fallait également diminuer la dette publique, notamment en réduisant les budgets des services publics. Depuis lors, la répartition entre les revenus du travail et ceux du capital n’a pas cessé d’évoluer en faveur de ces derniers et le fossé entre riches et pauvres a continué à se creuser.
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