Bruxelles au plus offrant III ~ Idéologie et domination sociale dans la gentrification

Pour rappel, dans les articles précédents (Bruxelles au plus offrant I et II), nous insistions sur les multiples dimensions de la gentrification. Nous défendions l’idée que pour comprendre le phénomène il ne fallait pas l’isoler dans sa seule dimension économique, bien que celle-ci soit essentielle. Les ressorts du phénomène se trouvent également dans ses dimensions sociologiques et politiques.

Nous poursuivons notre réflexion en examinant les questions de la domination sociale et du rôle de l’idéologie.

1. Une société structurellement inégalitaire

Nos sociétés libérales qui prônent l’égalité des chances sont, dans les faits, fondamentalement inégalitaires. Derrière le vocable « égalité des chances » se cache l’inégalité fondamentale des destins. Les études montrent en effet que l’origine sociale des individus est déterminante dans la position qu’ils occupent dans la société et sur leurs conditions de vie.

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Bruxelles au plus offrant II ~ « Améliorer » les quartiers populaires

Dans un article précédent, nous soulignions les mécanismes économiques présidant à la gentrification des quartiers populaires de Bruxelles.

Nous indiquions aussi que cette dimension économique n’était pas la seule à l’œuvre et que le phénomène se développait aussi sur le plan sociologique, notamment sur celui des dynamiques de domination sociale.

C’est cet aspect que nous développons ici.

1. Un débat par articles interposés

Deux articles parus à quelques semaines d’intervalle, en août 2019 constituent une entrée en matière intéressante. Ceux-ci abordent la question spécifique des aménagements « verts » touchant des quartiers jusqu’ici populaires et représentent deux types de positionnement face aux changements qui s’opèrent actuellement dans les grandes villes.

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Web et Médias : « Allemagne de l’Est, histoire d’une annexion »

artcle Web Médias-01_01Article de Rachel Knaebel et Pierre Rimbert paru dans Le Monde Diplomatique de novembre 2019

Compte rendu :

La chute du Mur de Berlin « fête » ses 30 ans. C’est l’occasion pour les médias dominants de resservir l’histoire officielle d’une réunification de l’Allemagne, heureuse, synonyme de libération pour la population de l’ex-RDA. Pourtant, l’histoire réelle est moins idyllique. A l’analyse, on est forcé d’admettre que l’absorption des territoires de l’Allemagne de l’Est s’est faite sous la contrainte dans un climat violent de pressions politiques et de prédation économique orchestrées par les autorités et les puissances économiques de la République Fédérale d’Allemagne (RFA).

C’est ce que montre cet article du Monde Diplomatique, indispensable face au discours officiel des commémorations, tant l’envers du décor est quasi toujours ignoré : Lire la suite

Bruxelles : l’injonction à la mixité sociale, un outil de gentrification ?

gentrification

1. Faire la leçon aux classes populaires

La mixité sociale constitue un thème consensuel qui, au delà des bonnes intentions qu’il semble exprimer, s’avère souvent, à l’analyse, beaucoup moins innocent.

Le discours officiel prononcé le 4 mai 2019 par Charles Picqué, à l’occasion du trentième anniversaire de la Région de Bruxelles Capitale offre un bon exemple de l’instrumentalisation de ce pseudo-concept présenté comme une évidence.

Extrait du discours diffusé dans le JT de 13h30 de la RTBF :

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« Il n’y aurait pas d’inégalités dans la distribution des profits », une fable libérale à déconstruire

idéologie néolibérale

Une étude d’Oxfam peu appréciée par le patronat

Au mois d’avril, le service d’études d’Oxfam-France publiait un rapport intitulé CAC40: des profits sans partages .

Le texte introductif brossait le tableau suivant :
« En 2017, 82 % des richesses créées dans le monde ont bénéficié aux 1 % les plus riches, alors que les 50 % les plus pauvres n’en ont reçu que des miettes.
La France n’échappe pas à cette tendance : les 10 % les plus riches détiennent plus de la moitié des richesses nationales quand les 50 % les plus pauvres ne se partagent que 5 % du gâteau.
Cette répartition inégale des richesses s’organise d’abord là où elles se créent : au sein des entreprises »
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Marx au XXIème siècle, toujours vivant (suite)

Marx politique

2. La dimension politique

Nous terminions notre article précédent en citant la célèbre 11ème thèse sur Feuerbach :

« Les philosophes ont seulement interprété le monde de diverses manières, ce qui compte c’est de le transformer »1.

Belle introduction pour aborder l’autre aspect de l’œuvre de Marx, son apport concret et toujours actuel dans les luttes sociales, c’est-à-dire, sa dimension politique.

Difficile en effet de parler de Marx sans parler de politique. L’auteur, s’il fut un chercheur à part entière, de par l’ampleur et la rigueur de ses productions théoriques, était aussi un homme d’action. Sa prise de position dans les mouvements révolutionnaires de l’époque, sa participation active à diverses organisations ouvrières, son refuge en Belgique, puis son expulsion du pays, la mise en place de la première internationale ; tout cela en fait un personnage politique de premier plan. Une des caractéristiques essentielles de Marx est justement cette articulation intime et indissociable entre théorie et pratique.

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1917 dans les médias, une compassion à sens unique

révolution russe

Février 1917 (8 mars, selon le calendrier grégorien), manifestation à Petrograd

 

Voici cent ans, la révolution d’octobre bouleversait le paysage politique et social de la Russie. Anniversaire traité par les médias dans des tonalités assez contrastées, allant du documentaire historique plus ou moins objectif au reportage focalisé sur l’aversion des classes privilégiées pour cette révolution1.

1. Une « commémoration » partiale Lire la suite

Partir des besoins

politique partir des besoins

 

Marseille – quartier du Panier

 

« De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ».

Cette phrase, qui puise ses racines dans les mouvances socialistes du XIXème siècle, reste d’une grande actualité. Elle résume bien la préoccupation d’une société démocratique, qui devrait se soucier du bien-être de chacun, c’est-à-dire des conditions de vie concrètes de ses citoyens. Deux choses apparaissent dans cette phrase : la question des besoins et celle de la solidarité sociale.

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L’improbable neutralité des sciences économiques

sciences économiques idéologie
Paris – Quartier de La Défense

En 2013, le journal Le Soir titrait : « L’index nuit à la santé des entreprises »1. Loin d’être le seul à s’enquérir de l’état de santé de l’économie, de nombreuses publications expriment la même préoccupation et étendent leur sollicitude à la santé psychologique des « acteurs économiques » : « Les marchés plutôt optimistes pour 2017 »2, « Chili: les marchés inquiets de la grève à la mine de cuivre d’Escondida »3. D’autres fois, il est question du Belge : «  Voici combien le Belge épargne chaque mois »4, « Le Belge a épargné 12,5% de ses revenus »5, « Le Belge travaille près de trois ans de moins que l’Européen »6 .

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